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Rapprocher l’offre et la demande d’hydrogène au niveau européen

La représentation en France de la Commission européenne, sous la voix de Clément Gerthoffert et Mathilde Oms de la DG ENER, présentait ce 3 juin dans ses locaux parisiens un nouvel outil visant à massifier l’offre et la demande d’hydrogène par agrégation, en tirant partie de l’effet taille du marché européen.

On connaît deux dispositifs se rapprochant de cette nouvelle initiative de la Commission, mais qui s’en distinguent pourtant par leur mode de mise en œuvre. Il s’agit d’une part d’AggregateEU, dont l’objectif est de stimuler l’agrégation de demandes d’achats de gaz pour les entreprises européennes par des mises en ligne d’offres et de demandes d’acheteurs, suivie de mises en relation et allant jusqu’à la phase de contractualisation. L’autre dispositif similaire est l’initiative allemande de la fondation H2global, dont le but est de dépasser l’obstacle d’une faible demande et d’une offre encore insuffisamment abordable pour l’hydrogène et ses dérivés. H2global propose un système en ligne de double enchère, qui simule un marché fonctionnant à la fois du côté de l’offre et de la demande.

Le Mécanisme de soutien au développement du marché de l’hydrogène poursuit cet objectif de massifier la mise en relation entre l’offre et la demande par le biais d’une plateforme en ligne. Il est à ce stade un projet pilote, opéré au sein de la Banque Européenne de l’hydrogène, et qui étoffera ses services dans les années à venir en fonction des remontées des utilisateurs. La plateforme concerne l’hydrogène renouvelable (RFNBO), l’hydrogène bas-carbone et leurs dérivés. Elle sera ouverte aux producteurs et consommateurs de ces molécules, aux opérateurs de réseaux et aux institutions financières. À noter que la Commission prévoit de développer le même type d’outil pour les matières premières critiques.

La plateforme proposera, dès fin juin 2025, l’inscription des offreurs et demandeurs sur son site. Les demandeurs doivent être membres de l’UE, tandis que les offreurs, à l’inverse, pourront provenir du monde entier (sauf, sans doute, de Russie et de Biélorussie), à condition de fournir les certifications de qualité de leurs produits, en conformité avec la réglementation européenne. Dès septembre, un premier cycle ou « round » d’appels d’offres sera lancé, avec des « calls for supply interest », des « calls for demand interest », mais également des « infra market testing » pour tester l’intérêt pour la mise en œuvre d’infrastructures hydrogène. Les informations requises, sous forme standardisée ne concerneront pas que le produit, les volumes et les prix, mais également le stade de développement du projet (il s’agit bien ici d’offres de molécules non encore produites), les conditions de livraison, l’existence de subventions au projet, les besoins en financement, etc…

Le travail de la Commission se limitera à une vérification minimale des offres et des demandes, sur le critère de plausibilité : les acteurs sont supposés de bonne foi, et c’est lors de la mise en relation que la vérité se fera. Les données sur la plateforme seront protégées en tant que « données sensibles, non classifiées », selon la terminologie de l’UE. La Commission se réserve cependant un droit d’accès sur des données consolidées et anonymisées.

Une fois la vérification effectuée, la plateforme publiera les offres agrégées pour consultation par les demandeurs. Des filtres seront introduits afin de limiter l’accès à certaines données dans certains cas. Si l’un des acteurs manifeste son intérêt pour l’offre ou la demande d’un autre acteur, la mise en relation se fait et les parties mènent ensuite, de manière indépendante à la plateforme, leurs négociations commerciales et techniques.

La grande différence avec les systèmes analogues précités apparaît ici : le mécanisme n’est pas une place de marché et n’agit pas sur le marché, puisque les offreurs n’ont pas d’obligation de déposer des offres fermes. Les prix sont forcément indicatifs et dépendront en partie des négociations à venir avec les organismes financiers : ceux-ci pourront eux aussi mettre en ligne leurs outils de financement et se faire ainsi « matcher » par les offreurs ou les demandeurs.

La commission ne s’interdit pas de faire évoluer avec le temps le dispositif vers l’intégration d’offres fermes. Le mécanisme sera officiellement lancé le 12 juin prochain, à l’occasion de la semaine européenne des énergies durables, et sera opérationnel début juillet pour l’inscription des acteurs, puis en septembre pour les premiers calls.