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La Norvège se prépare à stocker le CO2 français

Début mars, la CCI internationale organisait en collaboration avec la Chambre de commerce franco-norvégienne et l’ambassade de France à Oslo des visites autour de la thématique hydrogène, capture et stockage du CO2...

Le complexe d’Heroya Park

Début mars, la CCI internationale organisait en collaboration avec la Chambre de commerce franco-norvégienne et l’ambassade de France à Oslo des visites autour de la thématique hydrogène, capture et stockage du CO2. Nous reprenons une partie des notes de Henri-Pierre Orsoni, chargé de mission à Euraénergie que nous remercions vivement, pour redonner les points essentiels de ces visites et La Française de l’Energie a bien voulu compléter par son témoignage personnel.

La Norvège produit 110 milliards de m3 de gaz par an ; en 2022, ce gaz lui rapporte 190 milliards d’euros, soit 9 fois plus qu’en 2019 et alimente son fonds souverain qui représente près de 4 fois le PIB du pays. La Norvège est également autosuffisante en électricité grâce à l’hydroélectricité.

C’est à partir de 2005 que la Norvège commence à déployer une filière CCS (Carbon Capture and Storage) avec la création d’une entreprise d’état Gassnova en charge de la R&D sur les solutions technologiques en matière de captage, transport et stockage du CO2. En 2012 est créé le Technology Center de Mongstad à partir d’une participation de l’Etat par Gassnova (73.9%) et avec des capitaux privés : Equinor (7%), Shell (8,7%) et TotalEnergies (8,7%). Le centre permet de tester in situ des technologies de capture : il est d’ailleurs ouvert aux groupes industriels français pour tester des technologies dans leurs projets de captage du CO2. En 2021, la décision finale d’investissement du projet Langskip (Drakkar en français) est prise : il s’agira d’investir 2,8 Md€ d’euros, dont 66% par l’Etat norvégien et 20% par la société Northern Lights détenue à parts égale par Equinor, TotalEnergies et Shell qui sera responsable du développement commercial et des opérations de transport et stockage permanent du CO2. En 2024, sera mis en service la phase 1 du terminal Northern Lights qui assurera la séquestration d’1,5 MT de CO2 dans un aquifère salin (eau non potable) à 2600m de profondeur en mer du nord. Ce CO2 provient d’un centre de traitement de déchets et d’une cimenterie, deux actifs norvégiens dont les contrats sont pris en charge par l’Etat, auxquels s’ajoute le premier contrat commercial avec Yara, premier projet européen de production d’ammoniac vert, situé aux Pays-Bas.

C’est sur la phase 2 du projet, dont la décision d’investissement est prévue pour 2023 et la mise en service en 2026, que TotalEnergies développe une capacité de stockage de 10 MT par an de CO2 dès 2030, incluant notamment Northern Lights, et entre 50 et 100 MT par an en 2050. Equinor a conclu un partenariat avec le belge Fluxys pour étudier un pipeline de 1000 km entre Smeaheia et Zeebrugge, connectant ainsi le hub belge et les pays voisins au puits de stockage norvégiens et transportant jusqu’à 30 MT de CO2 par an.

Le modèle économique d’Equinor prévoit la maîtrise du transport de CO2 et sa mutualisation entre les émetteurs. Les prix du stockage à la tonne de CO2 dépendent surtout des volumes annuels et durée d’engagement contractuels. Les bateaux sont à concevoir en fonction des distances à parcourir, des flux de CO2 à séquestrer et des moyens de stockage du hub de départ ; ils peuvent transporter jusqu’à 30 000 m3 de CO2. A noter que Northern Lights ne séquestre pas le CO2 dans les réservoirs de gaz naturel épuisés (depleted reservoirs) mais dans des cavités salines vierges, contrairement à d’autres projets en développement aux Pays-Bas et Grande Bretagne, qui réutilisent ces réservoirs déplétés.

Traitement des gaz par les amines

Bateau de transport d’ammoniac

La participation de la Francaise de l’Energie / GAZONOR, représentée par son Directeur des Projets, Yann Fouant, avait plusieurs objectifs. Le Groupe spécialisé dans la valorisation d’énergie en circuits courts qui a récemment acquis la société CRYOPUR – spécialiste européen de l’épuration de gaz, de biomethane, décharge, cheminée industrielle…, a déjà un projet à son actif en Norvège, sur la commune de Stord. Ce développement permet l’épuration de biogaz issu d’une méthanisation de déchets de saumon, afin de produire du Bio-CO2 et Bio-GNL.
La raison de la visite était également de comprendre les besoins et enjeux du CCS. Il en ressort plusieurs positionnements possibles pour le Groupe. Le principal est en lien avec la capacité de la solution CRYOPUR à capter le CO2 à grande échelle au niveau de pureté imposé par le CCS et directement en phase liquide. A ce titre, FDE pense pouvoir apporter des solutions concrètes dans le cadre de la démarche de décarbonation initiée par le Port de Dunkerque.
Autre positionnement possible : la Française de l’Energie teste en Lorraine, dans le cadre du projet REGALOR, les possibilités de stocker le CO2 dans les charbons.