Hydrogène natif bientôt en Hauts-de-France ?
Nous reparlons d’hydrogène blanc, mais cette fois-ci, plus proche de nous : en Lorraine et… pourquoi pas... dans les Hauts-de-France ?
Nous reparlons d’hydrogène blanc, mais cette fois-ci, plus proche de nous : en Lorraine et… pourquoi pas... dans les Hauts-de-France ?
Nous reparlons d’hydrogène blanc, mais cette fois-ci plus proche de nous : en Lorraine et… pourquoi pas…dans les Hauts-de-France ? La mise au jour d’hydrogène natif sur le site de Folschviller en Lorraine exploité par la Française de l’énergie ouvre en effet des perspectives sur notre région où l’entreprise exploite également le gaz de mine (« grisou ») sur l’ancien bassin minier du Nord-Pas-de-Calais. La démarche et la maturité du projet de la Française de l’Energie diffèrent de celles de Terrensis à Sauveterre de Guyenne(voir notre article d’octobre 2024). Là où ces derniers sont encore en phase de recherche centrée sur des poches d’hydrogène entre roches imperméables, la Française de l’énergie a déjà découvert la ressource, dissoute dans l’eau, et s’intéresse déjà à sa mise en exploitation. Explications par Yann Fouant, directeur de projets à la Française de l’énergie.
La Française de l’énergie (FDE) est une société française, cotée en Bourse, spécialisée dans la valorisation des énergies en circuit court. Grace à son activité, FDE évite l’émission de 3,5 millions de tonnes de CO2 par an. Le Groupe est présent en France, Belgique, Norvège et Bosnie, sur des projets de production d’énergies vertes telles que l’électricité, le gaz, la chaleur, l’hydrogène et propose des solutions de captures de CO2 à destination du CCUS.
Pôlénergie – Yann Fouant, comment la Française de l’énergie est-elle venue à s’intéresser à l’hydrogène blanc ? Une véritable expérience de sérendipité, je crois ?
Il est vrai que tout commence par une découverte inattendue, mais dont nous avons su saisir l’intérêt et l’utilité. Nous avons attendu pendant quatre longues années l’autorisation d’exploitation du puits sur le site de Folschviller en Lorraine où nous avions un puits foré pour l’exploitation du gaz de couche (CBM – Coal Base Methane). Nous avions alors profité de cette attente et confié le site au CNRS pour étudier la perméabilité du charbon en vue de la technologie nouvelle de séquestration du carbone (CCS – Carbon Capture and Storage) et pour tester une nouvelle sonde capable de séparer et d’échantillonner les gaz dissous dans l’eau au fond des puits. C’est à l’occasion des analyses réalisées au fond du puits que nous avons mesuré une présence d’hydrogène en profondeur (1 000m) à des teneurs de l’ordre de 12 % alors qu’en surface, il n’y avait rien de mesurable. Ceci s’explique par le fait que l’hydrogène est dissout dans l’eau, et sa concentration augmente avec la profondeur.
Pôlénergie – Mais alors, d’où provient cet hydrogène ?
Ce que l’on comprend, c’est que, pour reprendre les mots de notre directeur scientifique, nous avons un véritable réacteur à hydrogène sous les pieds. L’hydrogène provient certainement d’une réaction chimique entre l’eau et les roches ferreuses également perméables. La réaction semble constante et tout l’enjeu réside dans la mesure des volumes et surtout de la vitesse de renouvellement de cet hydrogène.
Les analyses isotopiques, géochimiques et contextuelles permettent de penser que nous avons là une réaction d’oxydoréduction entre l’eau et les carbonates ferreux comme la sidérite (FeCO3) ou l’ankérite (Ca(Fe, Mg, Mn)(CO3)2) et une réaction de déshydrogénation du charbon lors de sa transition vers l’anthracite. Ces deux réactions ont lieu dans des conditions de pression et de température élevées et bien précises.
Nous parlons bien de réacteur car nous ne sommes pas comme d’autres projets à localiser des poches existantes (type hydrocarbures) mais bien à tirer parti d’une usine de production permanente d’hydrogène aux dimensions extraordinaires. En effet, nous parlons ici d’un phénomène qui se réalise sur un volume de sédiments du Bassin Sarro-Lorrain qui s’étend sur 16 000 km2 à 3 km de profondeur.
Pôlénergie – Comment caractériser et certifier ce potentiel d’hydrogène blanc ?
C’est le but du projet scientifique Regalor 2. Regalor 1, piloté par le laboratoire GeoRessources (Université de Lorraine – CNRS) en partenariat avec la FDE, et en coopération avec des centres de recherche universitaires (LOTERR, PERSEUS, CRUHL) correspond à ce que je vous disais plus haut. Regalor 2 aura pour objet de caractériser cette ressource d’hydrogène blanc : quels volumes, quels débits ? Ce projet devra également vérifier l’hypothèse de sa genèse par réaction d’oxydoréduction. L’idée est de descendre à 3 500 m de profondeur avec un nouveau forage vertical qui sera réalisé par FDE. Le plus long est d’obtenir l’autorisation administrative de ces forages. Nous espérons obtenir la première production en surface fin 2026. à la suite de Regalor 2, nous avons pour projet de procéder à des tests avec la sonde sur des puits ennoyés d’autres bassins comme la Wallonie ou le bassin minier des Hauts-de-France : nous sélectionnons des ouvrages en fonction des nombreux carottages dont nous disposons déjà, des données géologiques et d’ennoyage que nous maîtrisons dans le cadre de notre activité de captage du gaz de mines. Nous savons que nous pourrons bénéficier du support de la Région pour avancer rapidement.
Regalor 2 a également pour tâche de travailler sur la sonde membranaire permettant de produire des volumes d’hydrogène plus conséquents à la surface.
Pôlénergie – La sonde est en effet spécifique et est au cœur de vos découvertes ?
Nous travaillons avec Solexperts qui a mis au point le SysMoG® : un système permettant de mesurer les concentrations de tous les gaz dissous dans les aquifères jusqu’à 1 500 m de profondeur ; c’est le résultat d’une collaboration entre le laboratoire GeoRessources de l’Université de Lorraine et le CNRS. La sonde SysMoG® est descendue dans le forage vertical pour mesurer en continu la composition et la nature des gaz présents en solution. Cette sonde est dotée d’une membrane de séparation pouvant résister à 100 bars ; l’idée avec Regalor 2 est d’optimiser la sonde pour travailler à des pressions atteignant plus de 300 bars, puisque nous descendrons à 3500m. Mais surtout, nous arriverions avec cette sonde à simplifier les conditions d’extraction car en séparant le gaz de l’eau en profondeur, nous éviterions la remontée inutile et chère de l’eau en surface. Nous pourrions alors définir les volumes exploitables, les débits et avoir une première estimation des coûts de production. Il restera à faire certifier ces volumes productibles pour intéresser à la fois nos clients et nos financeurs. En Lorraine, le puits foré est à proximité des infrastructures hydrogène du projet interfrontalier MosaHYc : de quoi ouvrir des perspectives commerciales.