Le 12 juillet dernier, le secrétariat général du Benelux rendait public, lors d’un événement, les conclusions de l’étude réalisée par le cluster industriel WaterstofNet Vzw, intitulée « Cross-Border Hydrogen Value Chain in the Benelux and its neighbouring regions » (voir notre newsletter de mars 2023).
Partir sur une étude sur l’hydrogène renouvelable qui intègre six régions voisines (les Hauts-de-France, le Grand Est, la Sarre, la Rhénanie du Nord-Westphalie, la Rhénanie-Palatinat et la Basse-Saxe) montre bien que le développement de cette filière ne peut se suffire d’un raisonnement géographiquement limité. À l’heure où les Hauts-de-France s’interrogent sur une nouvelle feuille de route hydrogène, il est intéressant de tirer certains enseignements pour notre région.
Le Benelux et les 6 régions voisines mentionnées exercent un leadership incontestable dans l’économie européenne sur des secteurs comme l’acier, la production chimique et les transports : ces régions, dont les Hauts-de-France, concentrent 43% de l’industrie de l’acier, 65% de la production de méthanol, 51% de la production d’oléfines et 43% de la production de molécules aromatiques. D’ici 2030, ces régions couvriront 15% de la production d’hydrogène de l’UE, 67% de ses importations, 16% de ses capacités de stockage et entre 19 et 41% de la demande en hydrogène. A eux-seuls, les Hauts-de-France concentreront 6% de la consommation d’hydrogène de ces régions et 5% de la production (65Ktonnes en 2028, lorsque l’ensemble des régions représenteront 1419 Ktonnes en 2030), nous apprend l’étude.
Elle rappelle par ailleurs que les schémas d’implantation des pipelines H2 sont déjà existants et que ceux-ci seront effectifs en 2030 et détermineront les lieux de production d’hydrogène.
On peut noter que les chiffres mentionnés pour notre région restent inférieurs à ceux produits par France Hydrogène (cf. « Trajectoire pour une grande ambition hydrogène à 2030 ») et ne valorisent pas certains de nos atouts typiquement français comme l’électricité décarbonée d’origine nucléaire, le foncier disponible en zone portuaire, les capacités d’importation, les capacités d’implantation d’unités de production chimique d’ammoniac et e-fuels. Nous restons perçus comme étant à la périphérie d’un ensemble dont le cœur industriel bat à forte pulsation !
Voilà donc le problème posé : laisser nos voisins développer une économie de l’hydrogène dont ils ont besoin et, à terme, en devenir les acheteurs ou au contraire, sur la base de nos atouts développer une capacité de production de l’hydrogène et transformation en nouvelles molécules pour alimenter notre industrie et celle de nos voisins. Cette étude constitue donc à nos yeux une opportunité pour rester dans la course de l’hydrogène européen.
Les 9 régions sont situées sur 5 pays européens « historiques » de la construction européenne. Elles peuvent donc jouer un rôle pionnier dans la conception d’un marché de l’hydrogène et doivent conserver un rôle privilégié auprès du législateur européen, notamment sur un certain nombre de sujets que relève WaterstofNet :
Collaboration entre les TSO (gestionnaire d’infrastructures) des différents pays,
Rationalisation de la croissance des ENR au même pas que les besoins en électrolyseurs,
Mise en place d’infrastructures transfrontalières,
Standards, certifications et homologations interopérables voire harmonisées notamment pour les stations hydrogène,
Taxation harmonisée,
Formation d’une MO qualifiée,
Financement auprès de la banque européenne de l’hydrogène.
De notre point de vue français, l’hydrogène décarboné, s’il veut être Hauts-de-France, doit aussi être européen. Du point de vue des autres régions mentionnées, l’hydrogène peut exister sans la France : à nous de choisir !