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Bilan énergétique : partir du national

En octobre dernier, l’Etat publiait un projet de plan national intégré Energie-Climat pour notre pays, dont la version finale est attendue pour juin 2024.

Ce projet croise les deux documents de gouvernance sur l’énergie et le climat que sont la PPE 3 pour les 2×5 années à venir et la SNBC 3 à horizon 2050, documents qui seront également soumis à consultation en 2024. Il s’agit d’un exercice de planification fixant un scénario cible fondé sur un ensemble de mesures et hypothèses. Ce scénario permet d’établir les budgets « carbone » globaux et sectoriels et les feuilles de route par secteur qui en découlent : l’occasion de faire le point sur quelques grandes orientations énergétiques de la France et comprendre la démarche nationale de bilan énergétique. Une nuance cependant : l’année 2022 reste pour l’ensemble des énergies très atypique : les chiffres sont donc à comprendre à l’aune de cette anomalie ; c’est le déroulement de la méthode au plan national qui nous intéresse ici au premier chef.

Le plan national rappelle tout d’abord les objectifs européens à 2030 pour notre pays :

  • Consommation d’énergie primaire : 1830 TWh avec une réduction du charbon de 70% pour la même période, une réduction du gaz naturel de 40% en 2030 et 60% en 2035 (base 2012) et une réduction des produits pétroliers de 50% en 2030 ;
  • Consommation énergétique finale de 1209 TWh, soit -30% par rapport à 2012 avec 58% d’énergie décarbonée dans le bouquet énergétique (dont ENR électriques 117 GW-125 GW, biogaz : 50 TWh, biocarburants : 48TWh, chaleur et froid renouvelable : 297 TWh) ;
  • 9,9 GW de nouvelles capacités engagées d’ici 2026 en production nucléaire ;
  • Baisse globale des émissions de GES de 50% (base 1990) en 2030, soit -5% par an entre 2022 et 2030 contre -2% sur la période précédente.

L’atteinte de ces objectifs se fera à partir des leviers de baisse des émissions qui ont des retombées positives en termes d’emplois locaux, qui améliorent le confort de vie des citoyens, qui permettent de résoudre l’équation financière difficile des ménages et qui augmentent la compétitivité des entreprises et l’autosuffisance énergétique.

On insistera particulièrement sur la décarbonation des énergies puisque les émissions issues de leur combustion représentent 70 % des GES de la France. Cela passe, selon la PPE 3, par la sobriété énergétique, l’efficacité énergétique, le développement des ENR et la relance du nucléaire. La neutralité carbone à 2050 est réaffirmée par le document et est inscrit dans la loi.

La PPE3 se donne pour objectifs :

  • L’électrification massive : 640TWh de production électrique décarbonée en 2035, en s’appuyant sur le nucléaire et les ENR ;
  • La multiplication par deux d’ici 2035 de la chaleur renouvelable et de récupération (passage de 183 TWh en 2021 à 419 TWh en 2035 par le développement de la biomasse, les géothermies, les pompes à chaleur et le biogaz) ;
  • Déploiement massif des gaz verts «injectables», méthanisation, méthanation, pyrogazéification, gazéification hydrothermale : 50 et 85 TWh à 2035 ;
  • Déploiement massif de l’hydrogène décarboné : 10 GW d’électrolyseurs en 2035 autour des pôles en forte demande ;
  • Soutien aux biocarburants : 90 TWh en 2035, dont 50 TWh produits en France ;
  • Recours à la biomasse : 228 TWh en énergie finale dès 2030.

Enfin, pour les émissions incompressibles, le CCS (Carbon Capture and Storage) permettra de capter 4 à 8,5 MtCO2/an en 2030 et 20 à 50 MtCO2/an en 2050 pour le secteur industriel. Un régime de soutien pour la décarbonation profonde de l’industrie sera lancé en 2024 via des « contrats carbone pour différence » (CCfD).

Ces objectifs ont de grandes conséquences sur nos infrastructures énergétiques : RTE et ENEDIS réviseront leurs trajectoires pour tenir compte de l’accélération de la transition énergétique (schéma directeur de développement du réseau de transport d’électricité, augmentation des investissements, déploiement de réseaux), maintien des infrastructures gaz pour le biogaz, déploiement des réseaux hydrogène (d’ici 2026).

D’un point de vue méthode, les comités régionaux de l’énergie sont appelés à jouer un rôle dans la planification et la déclinaison territoriale des objectifs énergétiques, notamment à travers les zones d’accélération d’énergies renouvelables et les communautés énergétiques ou projets citoyens.

Point de départ : le bilan énergétique France à 2022

 

  • Toutes les quantités sont calculées en PCI
  • Les quantités intègrent les usages énergétiques et non énergétiques (la décomposition est entre parenthèse)
  • Pour chaque flux, le schéma intègre la production nationale d’énergie primaire (P), le déstockage (DS) et le solde import (I).
  • Les ENR thermiques (ENRt) englobent le bois et ses déchets, le solaire thermique, les biocarburants et les pompes à chaleur
  • La chaleur commercialisée est celle vendue par réseau de chauffage urbain
  • L’hydraulique intègre les énergies marines (EMR)